mercredi 23 janvier 2008

"L’île Seguin tourne chèvre"


Quel avenir pour l'Ile Seguin ? Le projet bien pauvre de Fourcade ci dessus ? Le désert élitiste de Baguet ?

Après l'état des lieux ci dessous de l'AFP,

c'est Libération et Le Monde qui se fendent d'un article éclairant sur ce qui se trame dans le dos des citoyens à propos de l'Ile Seguin.


Au lendemain de la conférence du Parti Socialiste sur ce sujet le mercredi 23/01 au soir à la Grand place (Voir la "Chronique..." du BBO), Benamou pousse un peu plus loin son projet, placant les pions du président peu avant les élections municipales.


Si les réticences liées à la densification prévue par la municipalité actuelle sont compréhensibles, supposer comme ci dessous que des espaces verts sont superflus tant le parc de Saint Cloud et la foret de Meudon sont proche, il y a un pas !

Soyons sérieux, le jardin des Scultures est un projet de prestige qui se fera sans les citoyens. De quoi dégouter un peu plus le quidam moyen de la politique, tant il aurait le sentiment qu'on décide à sa place...


AFP :


"Benamou souhaite que l'île Seguin devienne un jardin-musée de sculptures"

PARIS, 23 jan 2008 (AFP) — "Georges-Marc Benamou, conseiller de Nicolas Sarkozy pour la culture, est favorable à ce que l'île Seguin, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), devienne "le plus grand jardin-musée de sculptures du monde".

"C'est un rêve ancien de Nicolas Sarkozy quand il était président du conseil général des Hauts-de-Seine", a déclaré M. Benamou dans un entretien à Libération publié mercredi.

"Ce jardin-musée de sculptures configuré par Daniel Janicot (qui dirige l'association de préfiguration de l'Ile Seguin) doit éviter le bétonnage de l'île Seguin", souligne le conseiller.
Selon ses concepteurs, le voyage muséal commencerait avec la sculpture classique au bas du parc de Saint-Cloud, puis moderne sur l'île Monsieur et enfin contemporaine sur toute l'île Seguin. Ce serait un musée à ciel ouvert, sur 13 hectares.

Il coûterait environ 200 millions d'euros. Le conseil général, les élus locaux et les collectivités locales réfléchissent au financement de ce "projet fantastique", a indiqué M. Benamou.

Les terrains autrefois occupés par les usines Renault ont fait l'objet depuis ces dernières années de plusieurs projets, dont le plus médiatisé était celui d'une fondation culturelle que voulait l'entrepreneur François Pinault. Ce collectionneur d'art avait renoncé en mai 2005 en raison, selon lui, de lourdeurs administratives et était parti pour Venise."


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Libération:


"L’île Seguin tourne chèvre"



"Du passé faisons table rase pour transformer l’île Seguin de Boulogne en «jardin-musée de sculptures», explique Georges-Marc Benamou. Plus facile à dire qu’à faire, car les opérations prévues sur ce cœur des anciens terrains Renault sont déjà fort avancées. Etat des lieux.

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Les onze hectares de l’île appartiennent désormais en quasi-totalité à la société d’économie mixte Val-de-Seine aménagement, qui les a achetés 43 millions d’euros à Renault. Cette SEM, présidée par l’ancien maire de Boulogne Jean-Pierre Fourcade (UMP), a engrangé trois clients qui ont signé des promesses de vente et déposé leurs permis de construire : Cogedim et Intercontinental, pour un hôtel quatre étoiles de 180 chambres ; la Caisse des dépôts et ING pour une résidence de 240 appartements et 18 ateliers destinés à des chercheurs et des artistes; surtout, l’Université américaine de Paris jointe à la New York University, pour un campus, soit 12 000 mètres carrés de bâtiments d’enseignement et une résidence de 300 chambres.

Peut-on renvoyer tous ces gens vers d’autres terrains ? «Les preneurs vont demander des indemnités, souligne Jean-Louis Subileau, directeur général de la SEM. Au moins 4 ou 5 millions d’euros par programme. Et je ne parle pas du coup porté à la New York University, qui travaille depuis cinq ans sur ce projet.»


Autre détricotage délicat : l’arrivée de l’Institut national du cancer (Inca), créé par Jacques Chirac. Un protocole d’installation a été signé entre la SEM, la ville, le département et l’institut, qui loue déjà des locaux temporaires à Boulogne. Chasser les combattants du cancer serait peut-être financièrement moins dispendieux que l’évacuation des trois précédents, mais politiquement plus délicat. Reste le cas de la Smac (Salle des musiques actuelles), dessinée par Rudy Ricciotti et qu’il faudrait éventuellement déménager et remettre aux calendes grecques. Un nouveau maire doit-il se fâcher d’emblée avec la jeunesse ?

Georges-Marc Benamou, qui se targue du soutien des élus locaux, mise apparemment sur l’arrivée de Jean-Christophe Baguet, ennemi intime de Fourcade et candidat adoubé par l’UMP.

Ce succès sortirait Fourcade, qui se présente en dissident et défend ses années de projets engagés sur les terrains Renault.

A supposer que ces obstacles soient surmontés, il restera à faire un jardin sur d’anciens terrains industriels dépollués certes, mais pas pour un jardin. Le sol sur lequel on pose directement un bambin exige une dépollution beaucoup plus poussée que celui où l’on coule des dalles de béton.

Autre problème, financier celui-là : le «jardin-musée» ne générera aucune recette d’impôt pour la ville. Rude manque à gagner. Enfin, on peut se demander s’il manque 11 hectares de verdure - à peine la moitié du jardin du Luxembourg - à cette zone qui offre le parc de Saint-Cloud, le parc du Brimborion et la forêt de Meudon à trois pas."

L'article ici.

Images ici.

Mise à jour :

L'île Seguin désespère Billancourt

L'article du Monde le 27/01/2008 :

"L'île Seguin est-elle maudite ?

Depuis la fermeture des usines Renault en 1992, ce paquebot de 11 hectares immobilisé sur la Seine, à Boulogne-Billancourt, accumule les polémiques. Après le violent réquisitoire de l'architecte Jean Nouvel en 1999 pour protéger ce "krak des ouvriers", après le choc créé en 2005 par l'abandon du projet de fondation pour l'art contemporain de l'homme d'affaires et collectionneur François Pinault, voici venir la stupéfiante affaire du jardin de sculptures.

Boulogne, jeudi 24 janvier, 20 heures.

L'association Action pour les Hauts-de-Seine, créée et présidée par le sénateur Jean-Pierre Fourcade, en congé de l'UMP, pour défendre sa politique, tient son assemblée générale. Abondance de champagne et de petits-fours dans le salon de l'Espace Landowski, face à la mairie. Pourtant l'heure est grave. En cause : la remise en question par l'Elysée, sur fond de rivalité dans la course aux municipales, des projets d'aménagement de l'île Seguin. Soit l'un des projets urbains les plus ambitieux de la région parisienne, dont le chantier a démarré il y a trois ans après une décennie de concertation.

Devant une immense photo de l'île Seguin en chantier, M. Fourcade prévient : "Si un farfelu nous dit qu'on ne construit plus, on perd 200 millions d'euros de charges foncières. Qui va payer ? Vous, les citoyens boulonnais !"

Alors qu'un équipement culturel a toujours été envisagé sur les 3,5 hectares de la pointe aval de l'île, à l'emplacement laissé vide par le projet Pinault, l'entourage de Nicolas Sarkozy commence à évoquer, en décembre 2007, un scénario auquel personne ne croit guère : la transformation de la totalité de l'île en jardin de sculptures. Dans Libération du 23 janvier, Georges-Marc Benamou, conseiller culturel du président de la République, se fait plus précis et crée la surprise : "Ce sera un musée à ciel ouvert : une sorte de Zénith nouvelle génération, un grand musée, des ateliers sur les arts numériques, des lieux d'animation... Le grand lieu de vie, de promenade des Franciliens et des Parisiens."

"1 000 À 2 000 EMPLOIS"
Depuis, M. Benamou se contente d'évoquer "l'annonce officielle par l'Elysée, en février, d'un projet architectural et urbanistique". Un projet défini en toute discrétion par le conseiller d'Etat Daniel Janicot. "L'annonce de M. Benamou nous a un peu surpris", reconnaît M. Janicot. "Le projet est en train d'être calé. Il y aura un important jardin de sculptures, mais aussi des espaces culturels et de bien-être, des lieux de vie, des espaces verts." Seul problème : ce programme est en totale contradiction avec celui mis en oeuvre par Boulogne. Et l'Etat n'exerce aucune responsabilité sur ces terrains qui ne lui appartiennent pas.

L'île Seguin a été achetée 43 millions d'euros à Renault par une société d'économie mixte (SEM) dans laquelle la ville de Boulogne est largement majoritaire (64 %) à côté du département des Hauts-de-Seine (10 %) et de la Caisse des dépôts (15 %). L'objectif : associer, autour d'un jardin de 4 hectares, une cité des arts, un pôle d'innovation scientifique dédié à la santé et une cité internationale dotée d'une résidence de chercheurs et d'artistes et d'un centre de rencontres.
"J'ai non seulement agréé des projets mais j'ai vendu des mètres carrés, insiste M. Fourcade. 57 000 m2 de bâtiments sont déjà définis et lancés. Si on les annule, on va multiplier les contentieux." Cogédim-Intercontinental a acheté un terrain pour un hôtel quatre étoiles. Une résidence pour artistes et chercheurs est également dans les tuyaux, dessinée par l'agence Foreign Office Architects, ainsi qu'un bâtiment pour l'Université américaine de Paris, associée à la New York University, conçu par l'architecte Jean-Paul Viguier. Les trois ensembles sont livrables en 2010. "Les permis de construire sont déposés. La SEM a déjà encaissé 30 millions d'euros", reconnaît son directeur général, Jean-Louis Subileau.

La ville de Boulogne a aussi confié une scène de musiques actuelles, avec studios et résidence, à l'architecte Rudy Ricciotti. Et des négociations sont très avancées avec l'Institut national du cancer. "D'autres institutions nous ont contactés, insiste M. Fourcade, l'Inserm, le CNRS, HEC, Sciences Po, une quarantaine de labos." Au total, il est prévu de construire 175 000 m2 sur l'île. "Pour Boulogne, c'est de la vie, des entreprises, c'est 1 000 à 2 000 emplois. Les statues, elles, ne bougent pas et ne consomment rien", gronde le sénateur, selon qui le "projet Benamou" entraînerait pour la SEM "un déficit de 100 à 150 millions d'euros".

L'avenir de l'île Seguin dépendra de l'issue des élections municipales. Comme souvent à Boulogne, le vrai duel se disputera à droite. Contre toute attente, à 78 ans, Jean-Pierre Fourcade a décidé, le 16 janvier, de se représenter "pour sauver l'île Seguin". Après deux mandats à la tête de la ville, il avait laissé son fauteuil de maire, en mars 2007, à son dauphin désigné, Pierre-Mathieu Duhamel. Mais patatras : l'UMP a décidé d'investir le député Pierre-Christophe Baguet, transfuge de l'UDF, et M. Duhamel s'est retiré. Or M. Baguet ne cache ni son hostilité à M. Fourcade ni son intention de revoir les plans de l'île Seguin, en accord avec les souhaits présidentiels.

PLUS DE 6 000 LOGEMENTS
"Notre projet culturel est une alternative intéressante au bétonnage de l'île conduit par Jean-Pierre Fourcade à un prix exorbitant, défend M. Baguet. Quel est son projet ? Confisquer l'île Seguin au profit de pôles administratifs qui laisseront le site vide le soir et les jours fériés. Plutôt que de faire de ce lieu un ghetto pour privilégiés et hauts fonctionnaires, qui ne rapportera pas un centime de taxe professionnelle à la ville de Boulogne, ouvrons l'île aux Boulonnais en créant ici un lieu culturel très innovant."

Quant aux équipements déjà programmés sur l'île, M. Baguet propose de les transférer sur la terre ferme, où l'opération d'aménagement des anciens terrains Renault se prolonge sur un trapèze de 40 hectares : des bureaux en veux-tu en voilà, plus de 6 000 logements, un parc de 7 hectares, les plus grands noms de l'architecture (Portzamparc, Nouvel, Foster...). "Il y aura là 18 000 nouveaux habitants, l'équivalent d'une ville comme Saint-Cloud, estime le député Baguet. Il leur faut le bleu de la Seine et de la verdure sur l'île Seguin." A ceci près que la Seine est plutôt marron et que l'île Seguin tient plus de la plate-forme bétonnée que du sol en terre arable...
Retour dans l'auditorium de l'Espace Landowski. Jean-Pierre Fourcade, discours rodé, public acquis, répète : "Qui va payer ?" Le projet "coûtera environ 200 millions d'euros. Le conseil général, les élus locaux et les collectivités locales réfléchissent au financement", avance M. Benamou. "Le financement de l'Etat sera très faible, précise M. Janicot. Il y aura des financements privés et une participation importante du département. Il s'agit aussi d'inventer un type de gestion."

Tenue à l'écart de cette invention, la SEM de Boulogne-Billancourt observe avec inquiétude l'équilibre de son budget de 566 millions d'euros.

Grégoire Allix et Emmanuel de Roux
Article paru dans l'édition du 27.01.08."

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